Randonnée en vélo
 en France

Chaque jour, le lieu du coucher reste souvent  le grand inconnu ;  ça rentre dans mon défi de poursuivre la randonnée « Sur les routes de Jeanne d’Arc »
 

 

10 septembre

Il est 20 h 10, je viens d’aller chercher des œufs et du lait pour demain matin ; je n’ai pas de banane, ça fera changement. Je suis installé pour la nuit à Villey-le-Sec à 8 km de Toul, sur le bord de la Moselle, et contre toute attente, en camping.  

J’ai quitté Bar-le-Duc à 8 h ; la journée s’annonce ensoleillée. Après une montée de près de 3 km à 7 km/h, je me trouve sur un plateau vallonné, sur la N5, comparable à l’autoroute route 20 ; comme elle ne s’appelle pas autoroute, le vélo est permis, c’est très sécuritaire, vue l’accotement large. On entre dans la Meuse, le paysage n’est pas aussi beau que celui du plateau de la Champagne. On a parfois l’impression de pâturages laissés à l’abandon.

En prenant la Nationale, j’évite de nombreuses côtes, mais je me prive aussi du plaisir d’entrer dans les villages et bourgs.

Je sens au pied cette même douleur qu’hier, mais moins vive ; je m’arrête plus souvent par mesure de précaution et, curieusement, vers midi, je ne sens plus cette douleur. Je mange à 12 h 30 sur le bord de la Nationale, prenant le temps de me faire chauffer un bon café ; au menu : du pâté de campagne, une tomate et du pain. J’entre à Toul vers 13 h 30 ; je vérifie à l’Office du tourisme l’information que je possède sur l’hébergement et j’apprends avec plaisir qu’il y a un camping à 6 km. Je passe l’après-midi à visiter cette ville de 17 000 h., faisant partie de la région de Lorraine et du département de la Meurthe-et-Moselle dont elle est le chef-lieu. Je commence à démêler région et département. À une vingtaine de kilomètres de Nancy, Toul est peu connu ; pourtant son histoire est riche. Elle existait au temps des Gaulois, connut les dévastations des Huns en 451, abrita Clovis quand il fut instruit à la chrétienté. À l’époque de Jeanne d’Arc, la région subissait le conflit entre les ducs de Lorraine, vassaux de l'empereur d'Allemagne, et le duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, vassal du roi d'Angleterre, qui voulait conquérir la Lorraine. D’un autre côté, la France d’alors a toujours voulu annexer Toul : Philippe le Bel essaya en 1300 ; Henri en 1603 et le célèbre Charles VII en 1445. Toul fera partie définitivement de la France avec le traité de Westphalie en 1648.

Jeanne d’Arc se rendit à Toul plusieurs fois, d’abord pour y rencontrer le duc de Lorraine et lui demander, en vain, la compagnie de son gendre René d'Anjou. Jeanne d’Arc y parut plus tard pour paraître devant le tribunal de l'official, sous l'inculpation d'avoir rompu une promesse de mariage. A Neufchâteau un jeune homme était tombé amoureux de Jeanne et alla même prétendre qu’elle lui avait promis de l’épouser. C’était là une belle occasion pour Jacques d'Arc, le père de Jeanne, pour marier sa fille et la détourner ainsi de son projet de départ pour sa grande aventure. Elle avait toujours nié cette promesse. Elle se défendit seule avec succès. Devant la fermeté de Jeanne devant ses juges, Maldemaire n’avait pu que débouter le jeune prétendant.

Lors du procès de réhabilitation de Jeanne D'Arc, en 1456, Toul joua un rôle important. Parmi les commissaires envoyés par le Pape Calixte III, on y trouvait le Chanoine de TOUL, le doyen de Vaucouleurs et le notaire apostolique de TOUL.

L’après-midi est radieux et j’en profite pour faire le tour des fortifications construites par Vauban en 1700. Je m’arrête à la porte de Jeanne d’Arc, l’une des quatre portes des remparts.

J’entre dans la cathédrale Saint-Étienne, d’un style gothique flamboyant du XIIIe, début de sa construction, laquelle ne sera terminée qu’au XVIe siècle.

Avant de partir, je prends sous un soleil radieux une Kronenbourg à un café-terrasse qui donne sur la place centrale. Une vingtaine de jeunes filles et garçons y sont attablés et fainéantent ce bel après-midi de dimanche.

Les 6 kilomètres qui me séparent du camping me conduisent d’abord sur une route aux multiples reliefs, isolée et peu fréquentée. Je dois faire confiance dans mes renseignements. Un panneau d’information enfin annonce la visite du fort de Villey-Le-Sec, ouvert au public jusqu’au 30 septembre, les dimanches de 14 h à 16 h ; malheureusement, il est passé 16 h ; je sais du moins que je suis sur le bon chemin. Je commence à m’inquiéter quand je me retrouve au sommet d’une longue descente abrupte, plutôt un ravin qu’une côte (la côte Salaberry à Québec en plus long). La descente est interminable ; mes freins sont neufs ; heureusement. Je ne me vois pas remonter sur la plaine lorraine le lendemain par cette même route, pas avec mes 22 kilos de bagages. Même pas à pied.

À 17 h 30, je dresse la tente, prends une bonne douche et je revois les dates de la randonnée pour que, le 22 septembre, je sois à Roanne. Puis, je m’installe sous un arbre pour lire le Figaro du samedi.

Pour souper, je fais chauffer des légumes en boîte pour accompagner mes sardines.

 

11 septembre

Domrémy, 20 h 13. Je sors du restaurant le Relais Jeanne d’Arc en oblique avec l’église ; je me suis permis de prendre un steak accompagné d’un bon Côtes de Toul.
Je mange bien pour 83 francs (16,41 $) ; ce qui représente 5,06FR pour 1 dollar canadien. Puis, je m’installe à une table à l’extérieur pour écrire. Un couple d’Allemands conversent à la table voisine ; tout est calme ; je suis en T-shirt ; mais ça commence à refroidir. La nuit sera fraîche. À 21 h 30, je m’en vais à mon terrain de camping à quelque deux cents mètres. Domrémy, c’est plus que petit ; n’eût été Jeanne d’Arc…

Ce matin, par un autre chemin plus agréable et plus plat que la veille, longeant la Moselle, je suis retourné à Toul, pour chercher un fournisseur d’Internet ; comme c’est un lundi, tout est fermé ; je suis très déçu. La journée s’annonce belle : d’abord, la présence du soleil. Dans l’ensemble pas trop de côtes, sauf une, mais que je descends ; elle me paraît plus de 4 km. Je croise beaucoup de camions militaires : j’apprendrai plus tard que la région est le Valcartier français.

Dans les petites communes, je prends l’habitude de parler aux gens qui sont devant leur maison ; le prétexte, remplir ma gourde d’eau. L’un me parle des Canadiens qui bûchent dans les Vosges, à la suite de la tempête de décembre 1999 ; un autre, à Mont-le-Vignoble, me fait goûter à la mirabelle, une boisson alcoolisée faite à partir de la mirabelle, un fruit très sucré, semblable à la prune.

Jusqu’à Vaucouleurs, plusieurs petites communes mériteraient qu’on s’y arrête, mais il faut quand même rouler un peu. Je reste toujours tiraillé entre le goût de visiter et celui de faire du vélo. Mon projet en demeure un de vélo avant tout.

J’ai l’intention de m’arrêter à Vaucouleurs pour y coucher. C’est un lieu marquant dans la vie de Jeanne d’Arc ; c’est là qu’elle reçut une épée de Robert de Baudricourt et qu’elle fut équipée par le peuple, qui croyait à ses dons.

Je dîne sur un banc devant la mairie, à l’ombre d’une immense statue de Jeanne d’Arc à cheval, en attendant l’ouverture de l’office du tourisme à 13 h 30.

J’y apprends que tous les hôtels sont fermés les dimanche et lundi et le camping est fermé depuis un an. De toute façon, le château du duc qui avait pris Jeanne d’Arc sous sa protection a été complètement rasé depuis des siècles.

Je mets donc le cap sur Domrémy. Sur les 12 derniers km, je fais la route avec un enseignant de physique dans un collège de la région. Sans trop m’en apercevoir, j’augmente le rythme de roulement et c’est un peu fatigué que j’arrive à Domrémy. Et surprise, je vois un camping et je n’hésite pas d’y installer ma tente. Avant de défaire les bagages, j’ai amplement de temps d’aller visiter la maison de Jeanne-d’Arc, l’église du XIIIe siècle, là où fut baptisée Jeanne d’Arc.

Tout près, un centre culturel sur Jeanne d’Arc a été aménagé, où j’assiste à un vidéo d’une heure sur sa vie ; et j’apprécie ma chaise, même de bois.

Au début du voyage, des fois je me disais que cette randonnée était une folie ; mais aujourd’hui je me mets à penser que c’est une belle folie.

 

12 septembre

J’ai à peine le temps de me faire la barbe et de me laver les dents ; il commence à pleuvoir ; heureusement, ma tente est dressée, espérons que le traitement au silicone que j’ai donné avant de partir fera encore effet. Il est 20 h 42. Il éclaire et il tonne ; belle nuit en perspective et j’entends à travers la pluie les chiens qui aboient et la chute sur la Marne.

Ma journée ne s’est pas déroulée comme je l’avais prévu ; j’aurais aimé m’installer à Joinville et prendre le temps de visiter le château, l’un des 3 châteaux de type renaissance ; mais c’est mardi, et c’est la journée fermée pour les musées.

Quand je me suis levé ce matin, à Domrémy, une autre tente est installée sur le camping. Les portes des toilettes sont verrouillées et le service d’eau coupé. Je fais mes bagages et quitte à 8 h 15 sans payer. Je retourne au restaurant d’hier soir pour aller à la toilette.

C’est vraiment la première fois que je me suis endormi hier soir dès que je me suis couché ; ce ne pouvait être plus calme. J’étais en train de rêver quand deux salauds de chiens se mettent à aboyer et me tirent de mon sommeil.

À 1,5 km du village, je me contente d’un coup d’œil sur la Basilique du Bois Chenu bâtie entre 1881 et 1926 à l’endroit même où Jeanne entendit « ses voix » et dominant la vallée de la Meuse.

La route entre Domrémy et Neufchateau est facile. À 9 h 15, je suis à l’Office du tourisme pour trouver un fournisseur d’Internet ; je peux obtenir le service à la bibliothèque municipale, mais à 10 h, le temps d’ici là de visiter le vieux Neufchateau avec son église romane de St-Nicolas, la place Jeanne d’Arc, la mairie et les vieilles rues. En juillet 1428, les troupes anglo-bourguignonnes avaient attaqué Vaucouleurs et c’est à Neuchâteau, ville lorraine, que les habitants de Domrémy, par crainte, s’étaient retirés. À dix heures 8, je suis devant l’écran d’ordinateur. Je prends une bonne heure à lire le courrier et à y répondre ; je trouve que cet outil Internet est un facteur déterminant de mon voyage ; je me sens ainsi moins loin.

Il me reste du temps pour aller dîner à Liffol, à une dizaine de km; je m’installe sur un banc, où je me fais cuire du ragoût en boîte et un bon café pour accompagner mon dessert. Je sais que je dois me faire des forces, car je suis au pied des Vosges et les côtes m’attendent.

Et je suis bien servi ; une pente de trois km s’offre sur un plat d’argent ; je me mets en petite et j’essaie de penser à n’importe quoi, aux lieux visités, à la traversée en avion, à tout ce qui peut m’aider à oublier les coups de pédales. Je peux observer ici les ravages de la tempête de décembre 1999 ; il reste beaucoup de hêtres encore couchés. J’aurais aimé rencontrer des bûcherons québécois (ici, il faut dire plutôt canadiens), mais ils sont sûrement plus en profondeur dans la forêt. Sur le plateau des Vosges, j’ai un petit répit, bien que ce soit encore vallonné ; c’est une région agricole et on retrouve beaucoup de hameaux qui ressemblent à ceux de la région de Lyon. La guerre n’a pas détruit les maisons et on n’a pas pris le temps de rénover, comme ç’est le cas dans d’autres régions. Je regrette ma première idée, qui était de coucher à Poissons et de visiter Joinville le lendemain ; mais, comme il n’est que quinze heures et qu’il n’y a rien à voir à Poissons, je mise sur un terrain de camping possible à Joinville ; il y en avait un, mais la ville l’a fait fermer parce qu’il ne répondait pas aux normes. Il me reste à retourner sur mes pas à Poissons (8 km) ou à filer sur Froncles sur Marne ou à prendre un hôtel ; j’opte pour Froncles ; j’en profite pour arrêter à l’abbaye de St-Urbain, de style roman très dépouillé, où Jeanne d’Arc s’était arrêtée sur son chemin vers Chinon.

Je traverse la région de Voltaire ; il aurait fallu que je fasse un détour d’une vingtaine de km pour me rendre à Cirey-sur-Blaise : on ne peut tout voir. C’est possible que je passe la journée à Chaumont ; c’est une ville riche d’histoire et ça va me reposer ; on y trouve un terrain de camping d’ouvert.

Il est 21 h 42 et je ferme ma lampe ; il fait chaud et humide, sûrement 17o ou 18o au camping municipal de Froncles.

 

13 septembre

Il est 18 h 12 ; j’arrive du centre-ville de Chaumont, ville fortifiée construite au sommet d’un mont (mont chauve), en passant par Leclerc pour faire mon marché ; ce soir, je mange des œufs que je fais cuire.

Dès que j’ai éteint hier soir, je me suis endormi et je n’ai rien entendu de l’orage. À mon réveil, c’est nuageux et frais, mais sans pluie, comme ce le sera toute la journée.

Ce matin, j’ai voulu garder un souvenir des rives de la Marne ; j’installe ma caméra sur mon support à vélo ; le sol étant humide, la béquille s’enfonce et entraîne mon vélo par terre ; conséquence : mon miroir se brise et c’est trop dangereux de rouler sans lui. Cet après-midi, je prends le temps de le remplacer chez Poulot Cycles et j’en profite pour faire dévoiler ma roue arrière. De 11 h à 12 h 15, je m’installe à un poste Internet fourni gratuitement par le centre média de la bibliothèque municipale. C’est le moment où je fais le plein.

Avant de visiter la ville, je me rends au camping à 2 km sur la route de Troyes. Je dresse la tente, je dîne enfin sur une table de pique-nique à l’entrée du camping ; menu : pâté de campagne, tomate nature et un café avec un lait qui commence à surir. Pour retourner au centre-ville de Chaumont, je prends une petite route qui descend abruptement, comme la rue Salaberry à Québec, et qui monte par la suite ; des gens d’âge mûr applaudissent ma performance, qui ne suffit pourtant pas pour gravir la côte ; je m’arrête leur parler et une dame dans la quarantaine m’invite à prendre un café dans sa très jolie maison moderne ; nous parlons de choses et d’autres une bonne heure. Puis, comme tout bon touriste, je vais voir le fameux Viaduc long de 664 m et haut de 52 m, ouvrage qu’on dit unique en Europe.

La place de l’Hôtel de Ville est très animée, surtout qu’il y a un collège dans le secteur ; j’ai l’impression que les jeunes, lorsqu’ils n’ont pas de cours vont se promener dans les rues ; pour une deuxième fois depuis Compiègne, je prends le temps de marcher dans les rue commerciales et je me laisse tenter par trois beaux porte-clefs avec le signe astrologique Poissons ; ce sont de vrais bijoux, qui viendront enrichir ma collection. La dame qui me les a vendus est venue au Québec ; elle est allée même pêcher en janvier 2000 les petits poissons des chenaux. Elle a préféré le froid sec de Québec au froid humide d’ici.

Il est 19 h, je m’apprête à préparer le souper, sur un fond de nostalgie. On annonce du soleil pour demain. Après le souper, je commence un roman que j’avais acheté avant de partir de Compiègne : Khephrem et la pyramide du Sphinx de Guy Rachet. C’est un bon signe ; la lecture est le thermomètre de mes états d’âme. Quand j’ai le goût de lire, c’est que tout va bien. Dans les campings, on retrouve à cette période de l’année des Hollandais, des Portugais, peu de Français ; la communication est plutôt limitée.

Ce soir, je mets mon gilet de coton ouaté ; la nuit sera plutôt froide.

Depuis Château-Thierry, je roule le jour en bermuda ; mais ce soir, je sens le besoin d’ajouter le pan de pantalon détachable.

14 septembre

Il est 10 h 05 ; je viens juste de prendre en photo la croix de Lorraine juchée sur la colline de Colombey les 2-églises, à 5 km de là. J’en profite pour manger une pomme et me reposer ; c’est une région de blé et d’élevage de bovins, où les côtes et les plateaux se succèdent. Il est difficile ici et dans toute la Champagne de trouver du lait frais. On n’y trouve que du UHT, que je mets dans mon café. J’enfourche les 5 km qui me restent avant Colombey-les-2-églises.

11 h 20 : je viens d’acheter une croix de Lorraine en bronze pour mon garçon. Je crois qu’il l’aimera. Il a fallu monter à pied à côté de mon vélo pour arriver au Mémorial, où on a une vue superbe sur la vallée encaissée de montagnes.

Il est 12 h 28 : je termine de dîner en face du monument aux morts et d’une église d’une toute petite commune appelée Lignol à quelque 5 km de Colombey. Il fait soleil ; je roule en T-shirt depuis Colombey-les-2 églises. Il fait environ 24 degrés, mais c’est très humide.

Au menu : des sardines, du pain français et un bon café.

J’entre à Bar-sur-Aube à 13 h 15 : c’est entre midi et quatorze heures : tout est fermé, l’Office du tourisme aussi. En attendant 14 heures, je m’installe près d’une vieille église dont j’ignore encore le nom et j’écris une synthèse de mes impressions sur la Champagne, que je terminerai de visiter avec Troyes.

Il est 20 h 45. Je reviens d’une courte randonnée sur le bord de l’Aube ; c’est très joli avec les canards et les écluses. Cet après-midi, après avoir dressé la tente vers 14 h 30, j’ai marché dans la ville, plutôt un village comme Vallée Jonction ; je me suis rendu à la bibliothèque municipale pour avoir un poste Internet ; par bonheur, on offre le service à 15 francs la demi-heure ; j’ai fait près d’une heure pour le même prix. Puis, je suis rentré au camping prendre une bonne douche, laver mon linge à la main et faire le marché. Au menu ce soir : un rumsteak avec légume en boîte et comme dessert, du raisin, des biscuit recouvert de chocolat noir avec un bon café chaud.

Ici c’est un des meilleurs camping, tranquille, bien que le plus achalandé jusqu’à maintenant, et ce, pour 12 francs 50. Un contraste frappant avec celui de Chaumont qui a été le plus bruyant ; il faut dire que j’étais à 60 mètres à peine d’un boulevard de ceinture où circulent continuellement les poids lourds.

Bar-sur-Aude est le lieu de naissance de Gaston Bachelard, philosophe, dont j’ai déjà lu des livres à l’époque de mes études. Avant de dormir, je m’apprête à lire une petite heure.

15 septembre

15 septembre

9 h 45 Magny Fouchard, 15 km de Bar-sur-Aude

Je m’arrête pour manger ma pomme verte quotidienne. Le brouillard est maintenant dissipé. C’est un beau soleil qui brille ; je traverse des champs de blé houleux. Je me sens perdu dans cet espace, si loin.

Avant de reprendre la route, je transforme mon pantalon en bermuda ; le matin, c’est vraiment nécessaire d’avoir des pantalons longs. Il est 11 h 50. Je suis à 10 km de Troyes. Une aire de repos avec table (C’est rare !) m’invite à m’arrêter pour dîner ; il me reste deux œufs, ce sera mon dîner. Du raisin noir comme entrée.

Il est 21 h 35. Je viens de passer une heure de lecture dans une salle bien éclairée. J’en profite pour revenir sur ma journée. À 14 h, j’arrivais à l’Office du tourisme de Troyes. Comme d’habitude : où est le camping municipal, où puis-je trouver un fournisseur Internet, quels sont les lieux à visiter ? Sur la route du camping, je passe par la rue Mitantier pour saluer les parents du gendre d’un ami ; c’est un endroit très typique : j’ouvre la porte de fer qui donne sur une cour intérieure : plusieurs un jeune homme sort d’une chapelle ; je lui demande s’il connaît monsieur P. D. ; il me répond affirmativement et m’informe qu’il est parti à la campagne tout le week-end ; je suis un peu déçu.

À 14 h 45, je dresse la tente, je prends une bonne douche, lave mon linge à la main et retourne au centre-ville chez Techno.com pour lire les messages ; c’est mon réconfort de la journée. Puis, je prends le temps de déambuler dans les vieilles rues de la ville. Au retour, je passe dans un hypermarché Mutant, où j’achète du vin de la région à 5.95 fr, un dessert Étoile coco à 4,90 fr, 450 gr de beurre à 6.15 fr, du ravioli en boîte à 3.30 fr et du fromage à l’ail et aux herbes fines à 4.45 fr, pour un total de 27.25 fr (5,41 $) avec les taxes.

Il fait chaud actuellement, mais le temps est à la pluie.

Je m’en vais me coucher; il est 21 h 55. S’il fait beau demain, je file sur Auxerre en couchant à mi-chemin, sinon je couche encore ici jusqu’à ce que la pluie qu’on annonce cesse.

16 septembre

Il est 13 h 25. Je m’installe dans un local vitré, à l’abri d’un froid de 16 degrés, je crois, peut-être moins, je gèle des doigts dehors.

Comme dîner, je me suis fait chauffer du bœuf et des patates en boîte, accompagnés d’un vin rouge qui me restait. C’est très venteux et partiellement nuageux. Il a plu cette nuit ; mais pas depuis ce matin. Devant cette température incertaine, je décide de rester ici un deuxième soir. Cet avant-midi, je me promène dans le vieux Troyes et me rends à l’Office du tourisme de la gare pour obtenir de l’information sur les campings de la Bourgogne (de Troyes à Nevers).

Je passe par les Halles, grand marché ouvert, suis le circuit des églises. Troyes est complètement plane ; mais la circulation est difficile à cause de l’étroitesse des rues et des sens uniques. Ici l’air est sec ; déjà sur le chemin entre Bar-sur-Aube et Troyes, j’ai senti la différence ; je ne sue pas. Cet après-midi, je me repose ; je lis jusqu’à 15 h, puis je me rends chez Techno,com pour lire les messages, à 15 francs la demi-heure.

À 17 h 12, j’arrive de faire mon marché pour ce soir, un steak avec de la macédoine en boîte. Je me donne une heure de lecture avant de souper.

19 h 40. Je retourne lire dans l’abri vitré ; ici au moins on ne gèle pas, je passe la soirée à lire. C’est le plus beau et le mieux organisé des campings jusqu’à présent ; le prix n’est pas le même : 56 francs ; j’étais plutôt habitué à débourser une vingtaine de francs.

17 septembre

Je dîne près du pont canal de Bourgogne au pied de la commune élevée St-Fromentin.

Au menu, du thon et sauce tomate, très bon. La température est fraîche ; c’est pantalon long et veston aujourd’hui. C’est nuageux. Avec St-Fromentin, je suis dans l’Yonne en Bourgogne ; c’est plus vallonné.

J’arrive à 15 heures à Auxerre, ville d’art et d’histoire .

Le temps de monter la tente et je retourne visiter cette ville dont la première impression est très bonne. La route qui longe l’Yonne est magnifique. Je monte visiter l’église St-Étienne dans laquelle un grand vitrail rappelle les faits d’armes de Jeanne d’Arc ; puis je visite l’abbaye St-Germain, monastère bénédictin, converti en musée (et aujourd’hui, dans toute la France, les musées font portes ouvertes gratuitement). Je reviens à 18 h 30 souper au camping ; au menu, pâté de campagne. Puis, je m’en vais circuler dans les petites rue du centre-ville ; je passe sous la tour de l’horloge. Il est 21 h 15 quand je rentre au camping. La nuit s’annonce bien. Hier, c’a été la nuit la plus froide jusqu’à maintenant, j’ai dormi tout habillé ; ce qui ne sera pas le cas ce soir. Ce camping est aussi beau que celui de Troyes, sauf qu’il coûte seulement 25 francs.

18 septembre

Je quitte à 8 h 20 le camping pour revoir la tour de l’Horloge et m’y faire photographier; puis je cherche longuement la rue Conchois, une petite rue où se trouve un fournisseur d’Internet. En France, même en vélo, il faut que tu observes les sens interdits, sinon on te le fait savoir. J’arrête à un bureau de poste acheter un second paquet de lettres internationales et poste ma 10e lettre. J’arrive à 10 h 15 chez Infonet. «Ouverture 14 h le lundi.» Je vois quelqu’un dans le magasin, je frappe ; je lui explique mes raisons et il me laisse un poste Internet. Je sors à 11 h 10 et me mets en route pour Varzy ; ce qui coupe en deux le trajet Auxerre Nevers. Jusqu’à Clamecy, la route est vallonnée, mais abordable, bien qu’en quittant Auxerre j’aie à grimper une côte de 4 km avant de parvenir sur le plateau. Mais, entre Clamecy et Varsy, c’est le comble.

Clamecy est une très belle ville sur l’Yonne avec le canal. S’il n’était pas si tôt, je coucherais ici. Je me rappellerai longtemps la côte qui mène sur le plateau : longue et abrupte. Il y a 16 km entre Clamecy et Varsy ; je prends plus de 2 heures pour les franchir ; la dernière côte, je la monte à pied, mangeant des ronces sur le bord en quantité industrielle.

Il est 14 h 30, je m’arrête à Courson les Carrières prendre un café, beaucoup plus pour parler aux gens. C’est une région de culture et d’élevage de charolaises. 19 km de Clamecy.

J’arrive à Varzy à 18 h 15, j’installe ma tente et, pour me reposer, j’ouvre mon livre et je lirai encore quelque temps avant de souper. Je profite ainsi de la clarté du jour.

À 19 h 30, je soupe : le temps rafraîchit ; je transforme mes bermudas en pantalon et je mets une chemise que je ne mettais plus depuis Toul, je crois. Ce soir, je mange un Pot au feu à la Lyonnaise (en boîte), qui est vraiment dégueulasse ; ça goûte le métal et tout autre chose, sauf de la viande, des légumes et des patates. Vite un café et un dessert pour faire oublier ce goût ; même les légumes en boîte n’ont pas de goût.

Je viens de terminer mon café ; il est 20 h 22 ; le soleil est déjà couché. Je lave la vaisselle et me prépare pour le coucher. La nuit dernière a été très froide, probablement sous les 12e ; je m’attends la même chose ce soir ; je vais mettre mes sous-vêtements d’hiver pour la première fois.

19 septembre

Je crois que c’a été la soirée la plus froide , sûrement entre 10o et 12o C. De Varsy à Nevers, j’ai à lutter contre un fort vent du sud. À part la longue montée de Varsy, les 26 premiers km se font assez bien, donc jusqu’à La Charité ; de là, je m’engage sur l’autoroute 77 sur les 5 km de construits, puis sur la N7, exécrable, étroite, achalandée de camions, absente d’accotement.

Le ciel s’assombrit quand je rentre à Nevers à 14 h 20 ; j’ai eu le temps de réparer mon oreiller de plastique ; il est percé ; j’espère qu’il tiendra le coup. Je prends ma douche, lave mon linge. Il est 16 h 20. C’est l’orage : pluie et vent, éclair et tonnerre. Heureusement que l’emplacement est protégé par une haie, parce que la tente n’aurait pas résisté au vent. (Le lendemain, je lirai dans le journal que la tempête avait fait de forts dégâts à Marseille, particulièrement.) Je suis dans la tente ; en fait, l’orage ne me dérange pas trop, j’avais prévu me reposer du trajet de la journée. Alors, je lis dans ma tente jusqu’à ce que la pluie arrête.

Il est 19 h, tout est calme, je quitte le camping pour aller acheter du pain.

Après le souper, je vais circuler dans les rues de Nevers ; je passe devant la cathédrale, le Ducat, la Gare et sur la rue commerciale ; un début de pluie me contraint à retourner au camping ; il est 21 h 30 ; je me prépare à me coucher.

20 septembre

Aujourd’hui je visite Moulins, particulièrement le château des Ducs de Bourbons du XVe siècle, transformé en prison quand les Allemands s’y sont installés en 1940 et en prison d’État jusqu’en 1983.

J’aimerais coucher à Moulins, mais le camping est fermé depuis le 17 septembre. C’est une ville qui mérite un arrêt. Malheureusement, je dois mettre le cap sur St-Gérard sur Vaux à une douzaine de km de Moulins sur la route de Roanne. C’est le camping le plus isolé que j’ai rencontré, sur le bord d’un petit lac.

Je suis d’abord seul ; puis arrive un couple de parisiens, M et Mme. Sully, qui me gâteront un peu ; d’abord ils me demandent si j’ai besoin de quelque chose parce qu’ils doivent aller faire un peu de marché ; je leur dis que j’ai besoin d’une baguette de pain ; ils reviennent non seulement avec le pain, mais avec un bon vin de la région de l’Ardèches où ils avaient été en promenade, un pâté de campagne et une bonne chaise, pris de pitié de me voir sur mon petit banc de toile. Je prends une bonne heure de lecture avant de souper. Vers 9 h, je leur rapporte la chaise et ils m’invitent à prendre un café dans la roulotte. Nous parlons longuement de politique et ils sont très au fait de la politique canadienne et québécoise. À 23 h 15, je retourne dans ma tente. La nuit s’annonce très froide. J’épuise tout ce que j’ai pour me tenir au chaud ; je crois qu’à Roanne je vais magasiner pour m’acheter un sac de couchage pour une température de 5e C.

21 septembre

La route de ce matin jusqu’à la Pacaudière est très belle avec des points de vue extraordinaires sur la vallée. Il est 14 h. Je mange une pomme, assis devant la place centrale de la Pacaudière.

Je décide de me rendre dès aujourd’hui à Roanne au lieu de demain.

Je m’arrête à l’Office du tourisme de Lapalisse pour obtenir une adresse d’un fournisseur Internet. Il n’y en a pas. Le préposé téléphone à la Mairie pour vérifier si un poste est disponible. La réponse est positive ; je m’y rends pour envoyer un courriel à ma famille et à G. S. de Roanne pour l’informer que j’arriverais une journée plut tôt que prévue.

À 16 heures, je frappe à la porte des amis S.

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